Juillet 2019 – Une expérience de soins bénévoles au Togo


Je suis parti en voyage au Togo durant le mois de juillet 2019. Ce voyage avait dès l'origine un double objectif: découvrir le pays mais aussi soigner des gens pour être utile et donner du sens au delà du tourisme.

Concernant le tourisme, la rencontre avec le pays fut douce et heureuse. On surnomme le Togo "la petite Afrique" car on peut y croiser tous les paysages du continent Noir: la côte atlantique, les plateaux de forêt luxuriante, la plaine et les parcs animaliers, les territoires où subsistent les habitats et modes de vie traditionnels, et au nord les steppes et la savane qui annoncent la proximité du sahel puis du Sahara.

La mission de soins, quant à elle, faute de contacts préalables, a été improvisée sur place grâce aux liens que j'ai pu tisser dès mon arrivée, en particulier dans la région des plateaux de Kpalimé. Si on considère les infrastructures de santé vétustes, les soins coûteux et une offre de santé concentrée dans les villes, on comprend aisément que les population isolées et éloignées soient les plus fragilisées. C'est vers celles-ci que j'ai orienté mon action.

Les besoins étant immenses, il fut assez aisé de rencontrer un chef de village qui m'a invité à rejoindre sa localité pour y dispenser des soins. J'ai ainsi passé 4 jours au village de Dzigbé.

Je tiens à remercier mes amis de Marseille qui ont contribué à financer une partie des remèdes qui ont été très utiles (médicaments, homéopathie, acupuncture) et m'ont permis de faire cette expérience malgré les conditions difficiles et l'absence de soutien officiel des autorités de santé.

Le village de DZIGBE

C’est le village le plus haut perché du Togo, proche du Mont Agou, sommet du  pays. C’est un village à flanc de colline, où il n’y a pas de route, seulement des sentiers piétons qui serpentent entre les terrasses. Impossible d’arriver en voiture, ni même en moto. C’est seulement accessible depuis un chemin de forêt qui rejoint la route située à 30 minutes de marche. Tout se fait à pied, ce qui rend particulièrement difficile le transport de l’eau depuis la source située à 20 minutes à pied. Les trajets sont réalisés essentiellement par les femmes qui portent les bassines/bidons sur la tête sur un chemin sinueux en forêt.

Du coup tout est compliqué ! Le système de gestion de l’eau est rudimentaire, mais la pluie remplit allègrement les bassines disposées un peu partout pour stocker l’eau facilement pour tous les usages (!). L’électricité arrive au village et permet l’usage de réfrigérateurs pour certains et la télévision pour les plus aisés. Les constructions sont simples et la tôle ondulée est la technologie de premier choix dans une région où la saison des pluies est une réalité qui a surpris le marseillais que je suis. Il a plu quasiment 4 jours d’affilée pendant mon séjour; une pluie qui fait un vacarme assourdissant sur les toits de tôle et crée une ambiance hors du temps.

Heureusement, la gentillesse et la chaleur de l’accueil ont compensé la précarité du confort et l’état sanitaire général. Tout était sujet à rigolade, la bonne humeur régnait et les rires fusaient dans la salle de soin. J’étais juste heureux d’être là et d’être utile en soignant les gens.

les Soins

J’ai passé plusieurs jours au village, et le chef m’a installé dans la « salle du conseil », pièce ou il tient habituellement ses audiences. En effet, les habitants viennent le consulter pour tout type d’évènements pour lesquels son autorité fait loi selon la tradition coutumière (litiges, questions techniques et problèmes relatifs à l’administration et au voisinage, et en général tous les aspects liés au collectif)

Le chef a fait savoir au village que je tenais une permanence santé et que des consultations gratuites étaient dispensées. Il suffisait juste de se présenter… Pour faciliter le travail, j’ai été assisté bénévolement par Mawuli , chargé d’assurer la traduction entre le dialecte local ewe et le français.  Mawuli, 22 ans, est professeur bénévole au sein de l’école du village. En effet, la plupart des villageois parle un rudiment de français insuffisant pour communiquer et seuls les « anciens » et ceux ayant fait un minimum d’études parlent suffisamment le français pour échanger avec moi.

Sur un total d’environ une centaine de consultations, il y eu approximativement 80% de problèmes intestinaux, 15% de douleurs (musculo-squelettiques) et 5% de divers problèmes ( règles, pb génitaux, plaies…)

Les principaux problèmes que j’ai rencontrés étaient donc liés à des infections intestinales: staphylocoques, salmonelles en tout genres, amibes, colibacilles, listérioses… Les personnes avaient des symptômes de diarrhées et/ou douleurs abdominales qui dataient parfois de plusieurs années, voire de la petite enfance.

Au bout de quelques jours, face au nombre important de ces cas d’infection, il est apparu que l’origine de ces problèmes multiples était à mettre en relation avec le niveau de salubrité de l’eau, probablement contaminée du fait de l’absence d’infrastructures sanitaires (traitement des eaux usées, réseau d’eau potable…).

Des traitements furent donnés à l’ensemble des personnes venues consulter, mais face à cette triste réalité, ma présence ne pouvait qu’améliorer temporairement la situation. Seule la mise en place d’une infrastructure d’hygiène adéquate pourrait changer durablement la situation. Impuissant mais avec le sentiment d’avoir contribué positivement, j’ai quitté ce village avec une pointe de résignation, mais touché par la joie vive qui circule en ces lieux reculés, malgré les difficultés profondes et la précarité.